Hiver 1709 Quelques conséquences du Grand Hiver

Les conséquences de l'hiver 1708 - 1709 et de la vague de froid de 1709 sont dramatiques.


On estime entre  600 000  et 1 800 00 le nombre de personnes qui ont péri dans le royaume de France, de froid, de maladie, ou du fait de la famine engendrée par les mauvaises récoltes. Soit entre 3 et 8% d'une population estimée alors à 21 millions de personnes. Si on rapporte cela à la population actuelle de la France, cela donnerait de 1,8 millions à 5,4 millions de morts !) 

On a pu apercevoir ces effets dans le récit du curé de Feings qui note une augmentation de la mortalité en 1709, énumère les maladies auxquelles la population a dû faire face, ainsi que les effets sur la production agricole.

Les conséquences sont donc multiples, et les unes entraînent les autres

L'hiver, long et vigoureux a gelé les semences. On l'a bien senti dans le récit du curé de Feings. (Les populations ont pu cependant limiter les conséquences en semant de l'orge, qui pousse rapidement). Les récoltes ont donc été médiocres, dans bien des cas inexistantes. Les arbres fruitiers n'ont rien donné, et nombreux sont ceux qui sont morts. Il en a d'ailleurs été de même pour les autres arbres.

La mauvaise récolte a donc entraîné une raréfaction des denrées alimentaires, et par conséquent une augmentation des prix dont celui des céréales. Le prix du pain a été multiplié par 10, entre autres.
Bien entendu, le bétail a lui aussi subi des pertes. Nos ancêtres qui trouvaient leurs protéines animales dans les œufs, le lait ou le porc s'en sont vus privés
Des émeutes éclatèrent un peu partout dans les grandes villes et les tentatives de réglementation du commerce des grains n'aboutirent pas. 
Comme le royaume est toujours en guerre, et qu'il faut à la fois entretenir les troupes et se fournir en grain à l'extérieur, un nouvel impôt, du dixième de tous les revenus, est créé,  le grain entrant est exempté de droits de douane et de péage afin de facilité son importation.
De plus, En avril, une ordonnance obligea les détenteurs de grains à déclarer leurs réserves. Le document ci-contre en est l'illustration. Il s'agit d'une liasse judiciaire de baillage de Domfront (Orne) provenant des archives départementales. 
Le volume, dans son ensemble, est appelé:

Etat des récoltes après le grand hiver  (liasse partielle), est côté  AD61 6BP48 ) et concerne plusieurs paroisses du Domfrontais, dont Lucé (famille ROUSSEL), Saint Front (famille CILLIERE), Banvou, Beaulandais, etc. Il y a 157 vues, soit un peu plus de 300 pages, dont j'ai extrait la vue présentée ci-dessus et plus particulièrement l'extrait suivant, déclaration des récoltes de Julien LEVERIER.
Julien LEVERIER est peut-être, je n'en ai pas la certitude, mais c'est probable, un de mes ancêtres (soza 782)
Mon ancêtre Julien LEVERIER s'est marié à Saint Front en 1679, avec Françoise BEHUEL et a eu (au moins) un enfant avec elle, Renée LEVERRIER, née en 1692

Ceci dit, ce n'est qu'une supposition. Peut être que le déclarant n'est pas mon ancêtre. Il pourrait tout aussi bien s'agir d'un fils ou d'un neveu. De plus amples recherches sont nécessaires. Le document reste toutefois intéressant. La transcription suit




1. Dudit jour et onque dessus devant nous juge  susdit

2. dicretion  dudit Merville greffier

3. Ses presenté jullien Leverier de la paroisse Saint

4. Front, lequel a déclaré avoir racueilly douze gerbes

5. De bled seigle, quinze gerbes de froment rouge, quin vingt

6. Cinq gerbes d’orges et vingt d’avoine et vingt boisseaux

7. De carabin sur quoi il luy faut cinq boisseaux de bled 

8. et trois de froment trois d’orge un d’avoine et trois 

9. boisseaux de carabin pour ensemencer  unze? journeaux

10. de terre dont nous avons accordé xxx et à signé rature?

11. un mot nul 


La déclaration a été signée par Julien LEVERRIER, même si cela ne semble pas évident. Si on prend la page entière, l'extrait se trouve en haut à droite. La déclaration suivante est faite par Charles LEVERRIER, dont la signature est particulièrement lisible.

Remarques:

  • Le dit jour est le 2 novembre 1709 (il faut remonter à la vue 153 pour avoir la date de la déclaration. Celles ci se font à la chaine
  • Le premier mot de la deuxième ligne est bien discrétion. Ce n'est pas évident dans cet extrait, mais il est répété à chaque déclaration
  • Le carabin est un des autres noms du sarrasin, ou encore blé noir.
  • La gerbe est une unité de mesure ancienne utilisée pour les végétaux contenant encore leur grain. La taille variait d'une région à l'autre, de sorte qu'il n'est pas facile de se rendre compte de ce que cela représentait/ L'important est que tous les paysans d'une même région utilisaient la même mesure. Ceci dit cela correspond tout à fait à ce qu'on appelle gerbe aujourd'hui
  • Le boisseau est une unité de mesure de matières sèches, valant 12,934 l selon l'étalon de 1670, 13l selon celui de l'an X. Il se divise en 16 litrons ou 4 picotins
  • A la ligne 9, je ne suis pas certain du unze, qui doit vouloir dire onze. Un journal est la surface de terre qu'un paysan peut labourer en une journée




Sources:

Gallica: La grande famine en France 1709

Archives départementales de l'Orne ([AD61 6BP48] - Domfront (Bailliage) (Orne, France) - Liasses judiciaires | 1709 - 1709 disponible sur Généanet, vue 157)

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